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LES ETRENNES DES ORPHELINS ......... A. RIMBAUD
La chambre est pleine d'ombre ; on entend vaguement
De deux enfants le triste et doux chuchotement.
Leur front se penche, encore alourdi par le rêve,
Sous le long rideau blanc qui tremble et se soulève...
Au dehors les oiseaux se rapprochent frileux ;
Leur aile s'engourdit sous le ton gris des cieux ;
Et la nouvelle Année, à la suite brumeuse,
Laissant traîner les plis de sa robe neigeuse,
Sourit avec des pleurs, et chante en grelottant...Or les petits enfants, sous le rideau flottant,
Parlent bas comme on fait dans une nuit obscure.
Ils écoutent, pensifs, comme un lointain murmure...
Ils tressaillent souvent à la claire voix d'or
Du timbre matinal, qui frappe et frappe encor
Son refrain métallique et son globe de verre...Puis, la chambre est glacée... on voit traîner à terre,
Épars autour des lits, des vêtements de deuil :
L'âpre bise d'hiver qui se lamente au seuil
Souffle dans le logis son haleine morose !
On sent, dans tout cela, qu'il manque quelque chose...
Il n'est donc point de mère à ces petits enfants,
De mère au frais sourire, aux regards triomphants ?
Elle a donc oublié, le soir, seule et penchée,
D'exciter une flamme à la cendre arrachée,
D'amonceler sur eux la laine de l'édredon
Avant de les quitter en leur criant : pardon.
Elle n'a point prévu la froideur matinale,
Ni bien fermé le seuil à la bise hivernale ?...
Le rêve maternel, c'est le tiède tapis,
C'est le nid cotonneux où les enfants tapis,
Comme de beaux oiseaux que balancent les branches,
Dorment leur doux sommeil plein de visions blanches !...
Et là, c'est comme un nid sans plumes, sans chaleur,
Où les petits ont froid, ne dorment pas, ont peur ;
Un nid que doit avoir glacé la bise amère...Votre cœur l'a compris : ces enfants sont sans mère.
Plus de mère au logis ! et le père est bien loin !..Une vieille servante, alors, en a pris soin.
Les petits sont tout seuls en la maison glacée ;
Orphelins de quatre ans, voilà qu'en leur pensée
S'éveille, par degrés, un souvenir riant...
C'est comme un chapelet qu'on égrène en priant :
Ah ! quel beau matin, que ce matin des étrennes !
Chacun, pendant la nuit, avait rêvé des siennes
Dans quelque songe étrange où l'on voyait joujoux,
Bonbons habillés d'or, étincelants bijoux,
Tourbillonner, danser une danse sonore,
Puis fuir sous les rideaux, puis reparaître encore !
On s'éveillait matin, on se levait joyeux,
La lèvre affriandée, en se frottant les yeux...
On allait, les cheveux emmêlés sur la tête,
Les yeux tout rayonnants, comme aux grands jours de fête,
Et les petits pieds nus effleurant le plancher,
Aux portes des parents tout doucement toucher...
On entrait !... Puis alors les souhaits... en chemise,
Les baisers répétés, et la gaîté permise !Ah ! c'était si charmant, ces mots dits tant de fois !
Mais comme il est changé, le logis d'autrefois :
Un grand feu pétillait, clair, dans la cheminée,
Toute la vieille chambre était illuminée ;
Et les reflets vermeils, sortis du grand foyer,
Sur les meubles vernis aimaient à tournoyer...
L'armoire était sans clefs !... sans clefs, la grande armoire !
On regardait souvent sa porte brune et noire...
Sans clefs !... c'était étrange !... on rêvait bien des fois
Aux mystères dormant entre ses flancs de bois,
Et l'on croyait ouïr, au fond de la serrure
Béante, un bruit lointain, vague et joyeux murmure...
La chambre des parents est bien vide, aujourd'hui :
Aucun reflet vermeil sous la porte n'a lui ;
Il n'est point de parents, de foyer, de clefs prises :
Partant, point de baisers, point de douces surprises !
Oh ! que le jour de l'an sera triste pour eux !Et, tout pensifs, tandis que de leurs grands yeux bleus,
Silencieusement tombe une larme amère,
Ils murmurent : "Quand donc reviendra notre mère ?"
Maintenant, les petits sommeillent tristement :
Vous diriez, à les voir, qu'ils pleurent en dormant,
Tant leurs yeux sont gonflés et leur souffle pénible !
Les tout petits enfants ont le cœur si sensible !
Mais l'ange des berceaux vient essuyer leurs yeux,
Et dans ce lourd sommeil met un rêve joyeux,
Un rêve si joyeux, que leur lèvre mi-close,
Souriante, semblait murmurer quelque chose...
Ils rêvent que, penchés sur leur petit bras rond,
Doux geste du réveil, ils avancent le front,
Et leur vague regard tout autour d'eux se pose...
Ils se croient endormis dans un paradis rose...
Au foyer plein d'éclairs chante gaiement le feu...
Par la fenêtre on voit là-bas un beau ciel bleu ;
La nature s'éveille et de rayons s'enivre...
La terre, demi-nue, heureuse de revivre,
A des frissons de joie aux baisers du soleil...
Et dans le vieux logis tout est tiède et vermeil :
Les sombres vêtements ne jonchent plus la terre,
La bise sous le seuil a fini par se taire...
On dirait qu'une fée a passé dans cela !...
Les enfants, tout joyeux, ont jeté deux cris... Là,
Près du lit maternel, sous un beau rayon rose,
Là, sur le grand tapis, resplendit quelque chose...
Ce sont des médaillons argentés, noirs et blancs,
De la nacre et du jais aux reflets scintillants ;
Des petits cadres noirs, des couronnes de verre,
Ayant trois mots gravés en or : "À NOTRE MÈRE !"
je vous offre ce poème car il me tient à coeur
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Commentaires
~~ Que la sérénité du temps des fêtes soit un heureux prélude à l'année nouvelle, bonnes fêtes de fin d'année Joëlle ~~
*<|:-))
Très bon noël Joëlleà partager avec tous ceux qui t'aiment et que tu aimes...
Je t'embrasse
Je comprend que tu tiennes à ce poème, il est magnifique et m'a rendu toute émue... Bravo pour le partage. Passe un doux et chaleureux Noeël avec tes proches, je t'embrasse
Esclarmonde
(je voulais mettre une image mais n'y arrive pas :)
merci pour ce beau cadeau
Joëlle
Joyeuses fêtes de Noël pour toi et les tiens
gros bisous de la Corse
Coucou Joëlle
Je suis venu te souhaiter un joyeux Noël
Je te remercie pour ce magnifique poème
Bisous et toute mon amitié
Le Noctamplume
Un petit coucou pour te souhaiter une douce nuit réparatrice
Je rentre le chien et de ce pas, je vais dormir
Bisous
Le Noctamplume
Un petit coucou Joëlle pour te souhaiter une bonne soirée
Tu vois, il n'y a pas que toi qui étais mal réveillée, je me suis trompé dans la programation de mes articles.
J'ai réctifié et je le remettrais au bon moment
Je t'embrasse et merci encore pour ce merveilleux poème
Le Noctamplume
Et quand le bout d'l'an arrivera , nos esprits s'évaderont vers de jolis souvenirs passés avec nos mères ;') Bise Joëlle (:-*
un petit coup de blues Urban ??? çà va passer ::
regarde devant jamais derrière, ta vie est devant toi ...
je t'embrasse, belle soiréeà la bougie c'est sympa !!
Quelques nouvelles..........
Merveilleux poème , j'aime.......
Je pensais JOELLE revenir avant les fêtes comme j'avais promis mais un petit accident , une mauvaise chute a retardé ma guérison , si tout va bien , je ne serais de retour qu'après la nouvelle année ,et cela progressivement .
Je profite de ce petit mot pour te remercier d'avoir entretenu la flamme de la poésie qui brûle sur mon blog par tes gentils commentaires
Merci encore
J'en profite aussi pour te souhaiter une bonne et heureuse Année qui s'approche à grands pas
Bisous
thierry
comme je suis contente de te lire Timilo (c'est l'habitude) en plsu, une mauvaise chute... fais attention
je ne vais pas pas te souhaiter une bonne année maintenant mais te dire Bon bout d'an comme on dit chez nous.. peut être chez toi aussi NON ??
prends soin de toi et je t'embrasse tres fort...
merci à vous tous et avant de publier mes voeux, une bonne soirée de ce dimanche qui se trouve être le dernier de l'année 2012....
l'année s'en va une autre la remplace... c'est ainsi.... et se fait l' évolution des moeurs et de la société...
je vous embrasse tres fort à l'an prochain
ozy
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C'est très beau!
merci pour ce beau cadeau